Gastro-entérologie
Les 10 maladies digestives les plus courantes chez les personnes âgéesPar Fanny Bernardon le 19/04/2021
L’incontinence anale se définit comme la perte incontrôlée de selles et/ou de gaz par l’anus. Cette pathologie n’est pas grave en soi, car elle n’engage pas le pronostic vital, mais elle demeure un sujet tabou, jugé dégradant. Son retentissement sur la qualité de vie en termes de vie sociale, professionnelle et sexuelle, est considérable. C’est un problème de santé publique qui affecte 10 % de la population et jusqu’à 50 % de la population âgée vivant en institution, avec une prédominance féminine et un retentissement sur les activités quotidiennes dans 20 % des cas. Cette situation est non seulement difficile à accepter pour le patient, mais aussi difficile à évoquer avec le médecin traitant.
Par ailleurs, il est souvent difficile pour le médecin traitant d’orienter les patientes vers une consultation spécialisée, car peu de médecins et/ou chirurgiens sont compétents dans la prise en charge de cette pathologie spécifique.
La continence et la défécation dépendent de deux organes dont les fonctions se complètent. Le rectum qui est la partie terminale du tube digestif après le côlon et qui constitue une zone de réservoir de selles. L’anus ou le canal anal est un conduit court de 3 cm, fermé par les muscles de l’appareil sphinctérien qui l’enserre comme un anneau. Lorsque l’équilibre entre ces deux organes n’est plus maintenu, il peut apparaître des pertes incontrôlées de selles ou de gaz.
Il existe plusieurs causes d’incontinence anale :
- Causes dites idiopathiques : c’est-à-dire sans cause évidente ou secondaire à des poussées répétées sur le périnée (grossesse, accouchement par voie basse, constipation, toux chronique, …). Ces traumatismes indirects provoquent une lésion ou un étirement des nerfs du petit bassin et du périnée, dont le nerf pudendal, ce qui entraîne des troubles de la commande volontaire de l’appareil sphinctérien anal.
- Causes dites sphinctériennes : traumatisme du sphincter anal lié à un accouchement difficile (forceps, déchirure périnéale, …) ; à une intervention chirurgicale proctologique (chirurgie rectale pour cancer, hémorroïdes, fissure anale, fistule anale) ; à un traumatisme direct sur l’anus (accident, chute).
- Maladies digestives : syndrome de l’intestin irritable responsable de diarrhées ; maladie inflammatoire (RCH, Crohn) responsable d’une diminution des capacités de réservoir rectal du fait de l’inflammation de la paroi ; rectite radique avec inflammation du rectum après irradiation pelvienne (cancer du rectum, de la prostate) ; un prolapsus rectal avec perte de la sensibilité du rectum.
- Maladies extra-digestives : diabète ; sclérose en plaque ; accident vasculaire cérébral ; myopathies ; maladie de Parkinson… responsables de lésions nerveuses.
L'intérêt d’un deuxième avis dans le cadre d’une incontinence anale est multiple. Il s’agit d’un sujet tabou longtemps dédaigné non seulement par les médecins gastro-entérologues, mais aussi par les chirurgiens digestifs.
Un deuxième avis d'un spécialiste peut permettre de confirmer le diagnostic de l’incontinence anale et de déterminer l’étiologie de cette incontinence grâce aux examens complémentaires réalisés.
Vis-à-vis des traitements disponibles, un deuxième avis peut également être utile afin que le patient puisse prendre connaissance de l’arsenal thérapeutique à sa disposition. Le spécialiste expliquera le rôle et le but de chaque traitement et il indiquera au patient les traitements les mieux adaptés à son cas particulier.
Il est important que le patient atteint d’incontinence anale comprenne bien les traitements qu’on lui propose et ce qu’on en attend, il est aussi capital qu’il y adhère totalement. Il est primordial d’aborder sans peur et sans tabou cette pathologie pour que le spécialiste évalue le retentissement de cette incontinence sur la vie quotidienne du patient et ainsi qu’il propose une prise en charge adaptée.
En cas de chronicité de l’incontinence anale, un deuxième avis peut être sollicité à plusieurs moments du parcours du patient notamment pour revisiter son traitement.
Mais aussi toutes les questions spécifiques que vous vous posez.
Le spécialiste de l'incontinence anale à consulter dans le cadre d’un deuxième avis est le gastro-entérologue ou le chirurgien digestif, spécialisé dans la chirurgie colorectale.
Dans le cadre de la prise en charge, il est important de consulter un centre multidisciplinaire avec une équipe médico-chirurgicale à savoir incluant non seulement des proctologues ou gastro-entérologues, mais aussi des chirurgiens colorectaux, des gynécologues et des urologues, car il s’agit souvent d’une pathologie complexe du périnée dans son ensemble. La prise en charge peut également concerner le kinésithérapeute. Enfin, un soutien psychologique peut être utile au patient car l'incontinence peut altérer de manière importante la qualité de vie.
Les symptômes d'une incontinence anale peuvent être bénins ou sévères. Il peut s’agir de souillures des sous-vêtements, des flatulences non contrôlées, des besoins impérieux d’aller aux toilettes sans avoir toujours le temps d’y arriver. Ces symptômes peuvent être combinés avec d’autres symptômes tels que la diarrhée, la constipation ou des crampes abdominales. De plus, il est assez fréquent de voir une incontinence urinaire associée à une incontinence anale.
On distingue l’incontinence anale active c’est-à-dire l’impossibilité de se retenir (un « besoin pressant ») qui traduit plutôt une insuffisance des sphincters anaux et l’incontinence anale passive, c’est-à-dire la perte de selles sans s’en rendre compte, sans besoin d’exonérer qui est le plus souvent la conséquence d’un défaut de vidange du rectum (stase rectale) suite à une constipation, par exemple.
Enfin, en fonction de l’étiologie, c’est-à-dire de la cause spécifique de l’incontinence anale, on peut aussi retrouver d’autres symptômes. Dans le cas d’un prolapsus et d’une rectocèle par exemple, la sensation d’une boule anormale peut être perçue au niveau de l’anus ou dans la cavité vaginale. Dans le cas d'hémorroïdes, la présence de saignements ou de douleurs pendant les selles est fréquente. Lors des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin comme la maladie de Crohn ou dans le syndrome de l’intestin irritable, l’incontinence anale peut s’accompagner de diarrhées sanglantes ainsi que d’importantes douleurs abdominales.
Il existe plusieurs scores cliniques et de qualité de vie qui permettent de grader l’intensité des troubles de l’incontinence anale (score de Wexner, score de Cleveland Clinic). Ces scores sont utiles pour juger de la sévérité de l’incontinence anale et donc pour la prise en charge thérapeutique.
La première étape dans l’élaboration du diagnostic de l'incontinence anale est de procéder à un interrogatoire minutieux et complet. On réalisera donc un toucher rectal +/- un toucher vaginal pour rechercher un fécalome (accumulation de selles dans le rectum), un trouble de la statique pelvienne, c’est-à-dire une rectocèle (hernie formée par le rectum dans le vagin) ou un prolapsus rectal extériorisé ou non et aussi pour apprécier le tonus sphinctérien anal en demandant au patient de « serrer » les fesses.
En fonction des résultats de l’examen clinique, divers examens pourront être réalisés afin de préciser la cause de l’incontinence anale :
70 % des incontinences anales sont très améliorées grâce à un traitement médical. Le traitement correspond à celui de la cause mise en évidence, à savoir celui de la pathologie colorectale ou du prolapsus pelvien ou rectal, par exemple.
Dans un premier temps, tout trouble du transit intestinal doit être traité médicalement (constipation ou diarrhée), et la personne doit adopter une alimentation permettant d’avoir un transit satisfaisant (augmentation des fibres, de légumes verts et de fruits).
Les conseils concernant l’hygiène défécatoire comme ne pas différer les envies défécatoires et pratiquer une activité physique, doivent être suivis par le patient.
Si l’incontinence anale persiste, elle se soigne dans 70 % des cas grâce à la rééducation anorectale réalisée par un kinésithérapeute (ou une sage-femme en cas d’incontinence anale post-obstétricale). Au minimum, 10-15 séances sont nécessaires. Cette rééducation musculaire, mais aussi de la sensibilité rectale est indiquée s’il existe une faiblesse du sphincter externe. Elle peut être conduite par biofeedback, à l’aide d’une sonde équipée d’un capteur de pression introduite dans l’anus (des électrodes périnéales peuvent également être utilisées). Cette méthode permet la visualisation par le patient, sur un écran, des efforts de contraction des sphincters.
Lorsque le sphincter externe est rompu, la réfection chirurgicale du sphincter par suture (« sphinctérorraphie ») peut être envisagée. Grâce à cette réparation, un patient sur deux est continent jusqu’à 5 ans après l’intervention.
En revanche, lorsque les sphincters externes sont intacts ou peu atteints, mais que les nerfs ne sont plus en mesure de les commander, la neuromodulation sacrée permet d'améliorer la continence. Cette technique vise à stimuler les racines nerveuses autour de l'anus et du rectum (racine sacrée) en envoyant des impulsions électriques permanentes aux nerfs par des électrodes. Un test de stimulation de trois semaines précède l’implantation définitive d’un pacemaker sous la peau. Environ 50 à 60 % des personnes retrouvent alors une continence satisfaisante. Il s’agit du traitement actuel le plus efficace.
Des irrigations coliques antérogrades par caecostomie (intervention de Malone) sont réalisées soit par chirurgie soit maintenant par voie naturelle endoscopique.
Il existe également des appareils de lavement gérés au jour le jour par le patient (irrigations rétrogrades).
Enfin, en cas d’échec des traitements, une colostomie, solution de dernier recours, peut améliorer une qualité de vie très altérée. Une partie mobile du côlon est abouchée à la peau court-circuitant l’anus afin d'éliminer directement les matières fécales.
Actuellement, les sphincters artificiels ont été abandonnés même si leurs résultats étaient bons du fait du trop haut risque d’infection locale induit par ces « corps étrangers » implantés au niveau de l’anus.
Cette maladie pouvant être invalidante, d’un point de vue social ou professionnel, et mal vécu par le patient, un soutien psychologique peut trouver sa place dans le soin de l’incontinence anale.
Ajoutée le 12/12/2023
Chirurgien viscéral et digestif
Hôpital Saint-Antoine (APHP)
Gastro-entérologue
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Fred
Très bon accueil, très bonne écoute, les conseils donnés ont ouvert des possibilités de prise en charge intéressantes, merci beaucoup.
Denis
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